Martin Klôwè-Martinique
Anne-Sophie THOMAS est la jeune martiniquaise à l’origine de la start-up Matcherunbien qui propose un service de mise en relation des offreurs et des demandeurs de logement sur le marché immobilier privé et des outils de gestion immobilière pour favoriser une location plus abordable.

D’abord étudiante en Sciences politiques et en droit elle se réoriente vers une filière plus professionnalisation, un BTS en immobilier jusqu’à un master de Droit immobilier et un MBA en économie urbaine et immobilière. C’est en travaillant pour l’entreprise Etic, dont la mission est de permettre à des entreprises de l’économie sociale et solidaire (ESS) de disposer de bureaux à loyer modéré, qu’elle s’oriente vers l’immobilier ESS. Anne-Sophie revient avec nous sur la genèse et le développement de son projet.
Questions/Réponses
Quel est le principe de Matcheunbien ?
Il s’agit d’une plateforme d’immobilier social sous forme de site internet qui doit permettre de dynamiser l’offre de logement en accompagnant les propriétaires et locataires vers une offre de logement plus abordable. Le concept naît du constat (notamment dans l’hexagone) que le marché immobilier locatif est « tendu » ce qui fait que l’on se retrouve avec une demande de logement supérieure à l’offre.

C’est dans le cadre de mon MBA que j’ai fait une recherche empirique pour comprendre quels étaient les facteurs macroéconomiques qui pouvaient avoir un impact sur ce marché. Ces recherches m’ont permis de comprendre que même s’il y des politiques en faveur de la diminution des loyers (défiscalisation etc…). Les politiques publiques sont assez mal connues et elles peinent à avoir un réel impact à long terme sur les loyers.
Il s’agit donc de vulgariser le droit immobilier auprès des propriétaires afin qu’ils puissent avoir toutes les informations nécessaires. Il y également une fonction e-learning en développement qui permettra aux propriétaires de faire des simulations selon les différents dispositifs d’optimisation fiscale pouvant s’appliquer à leurs biens. De plus, l’une des vocations de Matcher un bien est de favoriser l’accès au logement en accompagnant les personnes en recherche de logement, notamment administrativement.

Qu’est-ce que l’immobilier social ?
L’immobilier social constitue en la garantie du droit fondamental qu’est l’accès au logement pour tous. Cela est possible en créant une offre qui soit plus abordable pour tous les locataires notamment en incitant les propriétaires à louer en dessous du prix du marché. J’ai voulu aller sur le créneau de immobilier de l’Economie Sociale et Solidaire par ce qu’il s’agit d’aider et non de spéculer. C’est une solution au phénomène de mal logement qui va en augmentant en France surtout dans les grandes métropoles.
Peux-tu dresser un bilan de votre activité aujourd’hui ?
Du fait de sa composante e-learning et de mes recherches pour avoir les services immobiliers les plus novateurs et pertinents, la plateforme prend plus de temps pour se développer car c’est un modèle qui demande d’importants investissements et de la recherche et développement. Aujourd’hui, il y a 6000 personnes qui suivent la plateforme partout en France et 1000 qui s’y sont inscrites. Dans les prochains mois, nous lancerons le module payant qui permettra aux propriétaires d’optimiser la location de leurs biens avec des loyers plus abordables. Nous étudierons également les impacts sur la part du budget des locataires avant et après l’utilisation de la plateforme.

Comment se développe la plateforme en Martinique ?
À l’origine l’entreprise a été créée en Martinique, néanmoins le marché y est assez différent en raison de la décroissance démographique et de l’exode des jeunes. L’offre de logement croît plus vite que le nombre de personnes. En Martinique, les problématiques sont plus de l’ordre de la salubrité avec des travaux d’entretien que les propriétaires ne parviennent pas à supporter financièrement. Il s’agit donc d’inciter les propriétaires à réhabiliter leurs biens pour offrir aux locataires de meilleurs hébergements. Il faut aussi accompagner les propriétaires de logements vacants et rassurer ceux qui rencontrent des impayés dû aux locataires qui ont des ressources plus bases que la moyenne et donc des difficultés à payer.
Nous concentrons actuellement le développement de nos services sur la Martinique et dans les grandes villes de France, puis nous nous établirons sur d’autres territoires comme la Guadeloupe.
Quels ont été les principales difficultés dans la réalisation de ce projet ?
En tant que petite structure, il a été difficile de trouver des fonds, mais j’ai pu bénéficier d’une aide de la DIECCTE dans le cadre du programme jeune entrepreneure (PIJE) qui propose une aide au démarrage. À l’issue d’un pitch, j’ai pu recueillir des fonds pour lancer la plateforme. Au-delà de cela il y a beaucoup de fonctionnalités qui demandent beaucoup de développement ce qui revient très cher quand on doit faire appel à des prestataires extérieurs. Il y a aussi l’adaptation des services aux contraintes territoriales dans lesquels ils sont développés (Métropole et DOM). Il me faut donc trouver des formes de financement autres que mes fonds propres pour accélérer le déploiement de la plateforme.
Je déplore aussi le manque d’accompagnement qu’il y a en Martinique où j’ai voulu lancer le développement de la plateforme. L’administration est lente à réagir, il est difficile de trouver des interlocuteurs tels que des incubateurs plus ESS. Je n’y connais que Kaléidoscope.
Le mot de la fin
Je pense qu’il y a beaucoup d’idées qui naissent dans les esprits des jeunes, qui représentent les générations montantes aux Antilles, mais qu’il y a un manque de structures d’accompagnement et de financements destinés à la création.
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